L’Atelier santé ville de Clichy-sous-Bois a monté, en partenariat avec le Comité départemental olympique et sportif de Seine-Saint-Denis et la Mutualité française d’Ile-de-France, un projet global de promotion de l’activité physique des jeunes de 6 à 16 ans. S’appuyant sur une approche socio-écologique, le projet est parvenu à augmenter l’activité physique des jeunes et à sensibiliser le service Urbanisme aux déplacements actifs. 

> PROBLÉMATIQUE : comment réduire et prévenir le taux d’obésité infantile préoccupant ?

[Mots-clés : alimentation & activité physique ; diagnostic partagé ; Ile-de-France ; parent & enfant ; partenariat & réseau ; programmation locale]

[Axe stratégique de la Charte d’Ottawa visé : Créer des environnements favorables à la santé]

 

 

Présentation de l’ASV

Structure porteuse de l’ASV : Commune de Clichy-sous-Bois (service Santé)

Co-financements de l’ASV : DDCS, Ville

Ressources humaines de l’ASV : 1 ETP

Coordonnateur ASV actuel en poste depuis : 2005

Historique et contexte : Clichy-sous-Bois compte plus de 30 000 habitants et présente des indicateurs de précarité préoccupants : 65,3% des ménages non-imposables, un taux de chômage à 23,5% chômeurs, 70% des habitants bénéficiaires d’allocations de la CAF). 80% du territoire intègre la géographie prioritaire de la politique de la ville et l’IDH2 (0,23) de la ville est le plus faible du département de Seine-Saint-Denis.

Concernant le champ de la santé, la ville est une zone déficitaire en médecins généralistes. Un ASV a été créé dès 2001 et développe sa programmation à l’échelle de la ville.

Intégration dans la politique de la ville : L’ASV de Clichy-sous-Bois est l’un des pilotes désignés du volet santé du contrat de ville de l’agglomération Clichy-sous-Bois/Montfermeil 2015-2020.

Autres dispositifs locaux en santé publique : Depuis 2012, la ville pilote un CLS qui renforce la démarche ASV. Le CLS compte six axes stratégiques : renforcer l’accès et le recours aux soins ambulatoires, promouvoir des environnements favorables à la santé, poursuivre la politique de prévention de proximité, mieux prendre en compte la santé mentale, promouvoir l’activité physique auprès des habitants.

 

Éléments-cadre du projet présenté

Échelle d’intervention du projet : ville

Porteurs du projet : Comité départemental olympique et sportif de Seine-Saint-Denis (CDOS 93), Mutualité Française d’Ile-de-France

Partenaires du projet : Maison de la diététique pour tous, établissements scolaires du 1er et du 2nd degré, structures sociales (centres sociaux, …), clubs sportifs

Public cible : jeunes de 6 à 16 ans et leurs parents

Durée du projet : 2012-2014

Co-financements du projet : ARS Ile-de-France (2012-2014)

Ressources humaines dédiées au projet : 0,5 ETP de la Mutualité Française + 0,5 ETP du CDOS 93 + 0,2 ETP du coordonnateur ASV

 

Histoire du projet

Un partenariat fort entre l’Atelier santé ville, la Mutualité française et le CDOS 93

Historiquement, l’ASV de Clichy-sous-Bois a travaillé sur l’activité physique. Ainsi, dès 2001, il a monté un projet suite au constat, pour un certain nombre de jeunes, d’une impossibilité à payer la visite médicale nécessaire à leur inscription dans club sportif. L’ASV avait alors organisé et pris en partie en charge les consultations avec des médecins du sport (accès au certificat médical d’aptitude à la pratique sportive).

L’ASV a aussi des habitudes ancrées de travail avec la Maison de la diététique pour tous et le CDOS 93, en menant des actions conjointes : ateliers de promotion de l’équilibre alimentaire et de saines habitudes de vie au sein des centres sociaux notamment, accompagnement du public et coordination des acteurs locaux sur la thématique du sport-santé, … Un diagnostic sur la santé des jeunes réalisé par l’ASV (enquête auprès des collégiens, analyse des données des bilans de santé en école maternelle et des centres d’examen de santé de la CPAM 93) avait mis en lumière des problématiques liées à la nutrition et à l’activité physique, notamment une prévalence de l’obésité plus élevée que la moyenne nationale.

En parallèle, l’union régionale de la Mutualité Française d’Ile-de-France a réorienté son action « Bouge… une priorité pour ta santé » initialement dédiée aux collégiens, vers une action plus globale intégrant l’environnement du jeune et les acteurs du territoire, dans le but de favoriser une pratique quotidienne de l’activité physique. Cette évolution s’est appuyée sur les réflexions de l’Institut National de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) et la diffusion d’une étude évaluée et validée ICAPS (Intervention auprès des collégiens centrée sur l’activité physique et la sédentarité). L’union régionale de la Mutualité Française de Picardie a développé un projet retenu par un appel à projet de l’Inpes en 2011 pour être l’un des sites pilotes de déploiement d’une méthodologie ICAPS.

L’ARS a fait le lien entre l’ASV, le CDOS 93 et la Mutualité Française, et les a orienté vers l’expérience ICAPS : une réunion en juin 2011 a permis de définir des objectifs communs par rapport à un territoire et une population cible, à savoir développer de saines habitudes de vie le plus précocement possible, via la promotion de l’activité physique sous toutes ses formes.

Alors que les priorités locales, départementales et régionales se sont rejointes, les acteurs (ASV, Mutualité Française et CDOS 93) ont saisi la fenêtre d’opportunité pour monter un projet de promotion de la santé par l’activité physique et sollicité un financement de l’ARS. Le partenariat s’est concrétisé rapidement, par une réponse à un appel à projet de l’ARS en septembre 2011.

L’objectif général du projet était d’améliorer la santé globale des jeunes de 6 à 16 ans (et leurs parents) par une augmentation de l’activité physique sous toutes ses formes. Le programme visait, en premier lieu, à décloisonner les acteurs locaux liés à l’activité physique, à la santé, à l’éducation ou au social, créer une dynamique locale et accompagner à la mise en place d’actions.

En 2012, le projet a démarré par la réalisation d’un diagnostic des besoins et ressources existantes. Il a relevé un déficit de l’offre sanitaire et des équipements sportifs. La coordination locale des professionnels apparaissait comme le levier essentiel à activer. « Il a fallu un an pour poser la dynamique locale » note le coordonnateur ASV. Ce temps a été nécessaire pour obtenir l’adhésion au projet des institutions, des professionnels et du public. Par exemple, pour mobiliser l’Éducation nationale, la porte d’entrée a été les conseillers pédagogiques pour que le projet s’intègre dans les programmes scolaires des classes de CE2 et CM1.

L’activité physique, levier d’amélioration de l’état de santé des Clichois

La démarche ICAPS est la matrice du projet développé à Clichy-sous-Bois. Elle se fonde sur une intervention menée dans le Bas-Rhin et reconnue efficace d’après les critères très sélectifs de la revue de littérature Cochrane. La stratégie développée repose sur le modèle socio-écologique et agit simultanément sur ces trois axes :

  • Les représentations et la motivation des jeunes ; 
  • Leur soutien social (parents, enseignants, animateurs) ; 
  • Leur environnement physique et organisationnel (pour rendre accessible l’activité physique au quotidien, à l’école et en dehors). 

De plus, l’évaluation de la recherche interventionnelle Icaps souligne que ce type de programme produit des résultats plus importants auprès des publics les plus précaires.

Le cadre d’ICAPS et sa validité scientifique a été « une caution » selon le coordonnateur ASV, auprès de partenaires institutionnels tels que l’Éducation nationale ou la DDCS pour présenter le projet. La démarche ICAPS a été une base solide qu’il a fallu adapter au contexte territorial et partenarial.

Une programmation d’actions coordonnées et mutualisées

Le projet « ne s’inscrit pas dans une action traditionnelle de prévention, avec une logique ‘action’, mais dans une construction d’un parcours ‘activité physique-sport-santé’, qui pourrait préfigurer une politique municipale à plus long terme. La construction d’actions pérennes de promotion de l’activité physique et sportive doit s’appuyer sur les relations et les intérêts communs des acteurs du sport, de la santé ainsi que de la politique de la ville »1.

Exemples d’actions mises en place : 

  • Formation « Activité physique et santé » auprès d’animateurs de centres de loisirs et de salariés d’associations à vocation sociale.
  • Projets transversaux annuels dans les écoles élémentaires et les collèges : conception de menus équilibrés, de publicités et d’un livret « manger bouger », organisation d’une course d’orientation, conception et entretien d’un jardin pédagogique et d’un composteur, … 
  • Accompagnement par un éducateur en activité physique adaptée (APA) des éducateurs sportifs de l’École municipale des sports démunis face aux jeunes en situation de surpoids, de maladies chroniques ou de handicap. Il s’est agi d’adapter les activités proposées aux enfants porteurs d’un handicap pour répondre au mieux à leurs capacités et leurs besoins. 
  • Des séances d’apprentissage du vélo pour les enfants et les parents dans les centres sociaux et dans le cadre du Programme de réussite éducative. 
  • Parcours « Activité physique et santé » : construction de parcours adaptés à tous les publics par des experts référents locaux (professionnels de santé, du sport, de l’éducation, du social). Des jeunes ciblés peuvent bénéficier d’un accompagnement multidisciplinaire (médecin, diététicien, psychologue, éducateur sportif), avec la participation de leurs parents. Ce dispositif existait avant le projet « Bouge ta santé » et a été conçu par une psychologue du Programme de réussite éducative et une diététicienne de la Maison de la diététique pour tous. 

Enseignements : une évaluation globalement positive et une sensibilisation du service Urbanisme

Dans le cadre d’une action d’apprentissage du vélo dans un centre social destinée aux enfants et aux parents, un groupe a fait plusieurs déplacements actifs jusqu’à la forêt de Bondy. Les routes n’étant pas balisées et sécurisées pour les déplacements à vélo, le coordonnateur ASV a soulevé le problème auprès du service Urbanisme de la ville. Depuis, le travail se poursuit, au-delà des questions de voierie. Ainsi, le coordonnateur ASV et le référent du CDOS 93 sont systématiquement consultés sur les projets urbains (notamment les plans de rénovation urbaine) afin de tenir compte des questions de santé. Par exemple, des chemins piétonniers seront intégrés au prochain Plan de rénovation urbaine ; des mobiliers urbains favorisant l’activité physique seront installés dans certains espaces ; …

Les trois porteurs du projet ont souhaité réaliser une évaluation en 2014, après deux années de mise en œuvre, avec l’appui d’un prestataire extérieur. Cette évaluation, financée par la Mutualité Française, avait pour objectifs de mesurer les apports et bénéfices du dispositif, proposer des pistes d’amélioration et préparer la poursuite de l’action à Clichy-sous-Bois et son déploiement sur d’autres territoires (notamment le département pour le CDOS 93). Elle note que l’impact à court terme est difficile à évaluer. En revanche, la dynamique locale créée est mise en lumière.

L’évaluation souligne l’intérêt de la coordination à trois porteurs. L’ASV a eu le rôle de pilote au niveau local et fait le lien entre les multiples acteurs. Le programme demande un fort investissement en termes de temps, donc une priorisation politique sur l’activité physique.

 

Résultats

  • Environ 300 enfants touchés (écoles primaires et classes de 6e et 5e).
  • Augmentation de l’activité physique des jeunes : après une année scolaire d’activité, les jeunes déclarent pratiquer une activité physique intense 3,4 fois par semaine, contre 2,4 auparavant. 
  • 13 animateurs périscolaires ou bénévoles d’associations ont participé à la formation « Activité physique – santé ».
  • 20 parents et 55 enfants bénéficiaires des sessions d’apprentissage du vélo.
  • 16 enfants pris en charge dans le cadre du parcours « activité physique et santé » : bons résultats en termes d’estime de soi.
  • Des clubs sportifs ont ouvert des sections « adaptées » au public sédentaire (jeunes et adultes). À ce titre, le club de randonnée local a doublé son taux de  licenciés.
  • Animations liées à la promotion de l’activité physique et à la santé proposées par les accueils extra- et périscolaires pour les jeunes Clichois.

 

Perspectives

  • Poursuite du projet porté par la ville et le CDOS 93 (la Mutualité française s’était engagée pour soutenir l’expérimentation pendant 3 ans).
  • Renforcement de la prise en charge des adolescents, voir des adultes, ayant des maladies chroniques par une équipe pluridisciplinaire (diététicien, éducateur en activité physique adaptée et santé) : repérage par le milieu médical, mise en œuvre d’une ETP (éducation thérapeutique du patient), orientation vers des clubs sportifs proposant des sections adaptées.
  • Pérennisation du volet « action dans les établissements scolaires » : un coordonnateur, salarié par le CDOS 93, et un éducateur sportif en activité physique adaptée et santé seront dédiés à ce dispositif (soutien de l’ARS Ile-de-France, de la Ville et du Centre national de développement du sport).
  • Fiches-actions Activité physique et sportive intégrées dans le Contrat local de santé 2015-2017 (qui constitue les orientations Santé du nouveau Contrat de ville).
  • Prise en compte de l’activité physique et sportive dans des dispositifs d’aménagement urbain (plan de rénovation urbaine, projet de centre-ville, …).
  • Portage politique local à réaffirmer : travail de communication et de valorisation du projet à mener. Il sera facilité par la promotion de l’activité physique par les niveaux national et régional. 

 

Bonnes pratiques

Clefs pour une implication réussie des acteurs sur un projet APS, relevées par les porteurs de projet :

  • Un portage politique affirmé et continu : inscription dans les priorités de la ville.
  • Création d’un comité de pilotage intersectoriel.
  • Une coordination locale identifiée : importance d’une équipe disponible interdisciplinaire dédiée (ici, complémentarité des porteurs de projet : ASV, CDOS, éducateur sportif, diététicienne).
  • Un soutien des institutions (ARS, DRJSCS, DDCS, Conseil départemental, CPAM, Éducation 
  • nationale, …).
  • Un fil conducteur : prise en compte du socle de la promotion de la santé dans la valorisation de l’activité physique au quotidien (compétences psychosociales, estime de soi, bien-être).
  • Une mobilisation globale des acteurs locaux autour d’un objectif général partagé entre les associations sociales, les associations sportives et les services municipaux et institutionnels.
  • Une appropriation de l’activité physique par les acteurs (formations, sensibilisation).

 

Paroles d’acteurs

« La promotion de l’activité physique et sportive s’inscrit doucement mais durablement dans la ville. » Michel Fikojevic, coordonnateur ASV

 

Ressources bibliographiques

 

Ressources méthodologiques

Guide d’aide à l’action « Promouvoir l’activité physique des jeunes, élaborer et développer un projet de type Icaps »

 

Contact

Michel FIKOJEVIC, coordonnateur ASV, michel.fikojevic[at]clichysousbois.fr, 01.43.88.83.69

 

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